HISTOIRE
Après de longues années passées en Afrique subsaharienne, Michel Bonfils (1932-2017) se lance dans la création d’une pépinière sur sa propriété familiale de 2 hectares plantée de noyers. Il entame quelques collections d’arbustes et plantes vivaces, arbres et arbustes rares avec une recherche affirmée d’originalité. Il s’intéresse de loin aux bambous, pourtant assez répandus en Dordogne, surtout sous l’espèce de Phyllostachys viridiglaucescens , planté il y a plus d’un siècle dans des parcs de châteaux, d’où il a essaimé chez les fermiers du pays, intéressés par les cannes (gaules, tuteurs et cannes à pêche).
C’est à la lecture d’un article de journal que tout un univers se dévoile. Il découvre qu’il n’existe pas seulement quelques espèces d’apparence très proche, mais des centaines de variétés de bambous très différentes (hauteurs, couleurs, forme des feuilles etc.). Fasciné par ces végétaux, qui constituent un monde incroyablement riche et varié et sont le pivot de nombreuses civilisations orientales et sud-américaines, il entame sa propre collection de bambous en 1989. Les noyers, spécialité du Périgord, sont coupés s’ils produisent peu, d’autres sont arrachés par la tempête. Au fur et à mesure, ils sont remplacés par de nouvelles espèces de bambous, échangés dans des jardins botaniques, achetés chez des collectionneurs dans toute l’Europe ou commandés en Chine. Dès 1993, son intérêt s’élargit aux autres plantes appartenant à la même famille botanique que les bambous.
Conçu initialement comme un conservatoire botanique et d’essai, et pourvoyeur d’une pépinière installée dans son voisinage immédiat, le jardin a été créé et a continué à évoluer comme un jardin naturel. Les plantes poussent sans contraintes excessives, et en respectant la terre et l’environnement –pas de pollution chimique– . Ce sont d’ailleurs les clients de la pépinière invités à visiter cet espace pour faciliter leur choix parmi les différentes espèces qui, fascinés par l’atmosphère dépaysante unique des ces plantations, suggèrent l’ouverture du jardin au grand public.
Trente ans plus tard, le jardin présente près de 240 variétés de bambous et 100 variétés d’autres graminées, des arbres et des arbustes rares et diverses autres plantes : tout un univers luxuriant à l’atmosphère unique.
Le Jardin de Planbuisson constitue une des plus importantes collections de bambous et autres graminées d’Europe : 4 collections génériques de bambous ont reçu le label « Collection Nationale » attribué par le Conservatoire des Collections Végétales Spécialisées (CCVS)
Le jardin a reçu en 2005 le label « Jardin Remarquable » renouvelé en 2010 et 2015, décerné par le ministère de la culture et de la communication.
L’Association des Amis du Jardin de Planbuisson : préserver une richesse botanique exceptionnelle
Afin d’assurer sur la durée la sauvegarde des collections végétales et pour ouvrir le devenir du jardin aux suggestions enrichissantes d’autres amateurs, Michel Bonfils a confié le jardin à une association régie par la loi de 1901 : “L’Association des Amis du Jardin de Planbuisson”, créée en septembre 2001. Cette association à but non lucratif a pour objectif de faire connaître ces plantes d’une richesse exceptionnelle que sont les graminées, auxquelles appartiennent les bambous.
LA COLLECTION DE BAMBOUS
La collection botanique de bambous du Jardin de Planbuisson, débutée en 1989 notamment avec la plantation du Phyllostachys bissetii, compte à ce jour 240 variétés !
Quelques éclairages sur les bambous
Le terme de “bambou” désigne en réalité des milliers de variétés de plantes qui, bien que de caractéristiques communes, peuvent être d’aspect très différent. Il existe ainsi de nombreux “genres” : Phyllostachys, Arundinaria, Semiarundinaria, Sasa, Pseudosasa, Shibataea, Sinobambusa, Acidosasa, Phyllosasa, Yushania, Thamnocalamus, Fargesia, Chusquea, Bambusa etc.
Caractéristiques communes à tous les bambous :
– leur feuillage est persistant
– ils se propagent par rhizomes (tiges souterraines)
– leur floraison est cyclique (tous les 30 à 120 ans) et mystérieusement grégaire (quand une variété fleurit tous les bambous de cette espèce fleurissent simultanément partout sur la planète !)
– la plupart sont comestibles (jeunes pousses= turions)
– leurs chaumes (les cannes) séchés sont un remarquable matériaux pour de multiples usages
Les bambous traçants (envahissants) :
Ce sont les plus connus chez nous car ce sont eux qui font de magnifiques cannes. Une bonne majorité des bambous qui poussent en Europe appartiennent à ce groupe. Leur taille varie d’à peine 1m (nains) jusqu’à plus de 20 m (géants). Leurs cannes sont de diverses couleurs, les feuilles de toutes les tailles (jusqu’à 50cm), peuvent être panachées jaune ou blanc. Très grande diversité ! La plupart aiment le plein soleil, résistent très bien à la sécheresse et au froid même s’ils préfèrent un terrain frais et un climat chaud.
Origine : Asie (Chine, Japon, Inde…) et France au temps des dinosaures !
Les bambous non-traçants (cespiteux) :
Ils sont maintenant très prisés pour une bonne et simple raison : ils ne « courent » pas ! Ils sont parfaitement adaptés aux petits jardins, ou plantés en bacs. Leur port est compact, pleureur en condition fraîche. Ceux que l’on trouve chez nous viennent d’altitude, ce sont des bambous de montagnes. Ils résistent donc bien au froid, mais préfèrent une atmosphère humide. Ils sont à planter à l’ombre en climat chaud et sec. Leurs cannes sont assez fines, vertes (certaines cannes peuvent jaunir ou rougir à certaines saisons). Leur hauteur selon les espèces varie de 0,50m à 5m, avec des feuilles le plus souvent petites.
Origine : Asie, Amérique du Sud
À noter : les bambous tropicaux (Asie du Sud-Est, Amérique Latine) sont cespiteux, les plus hauts culminent à 40 m… mais ils ne poussent malheureusement pas chez nous à cause du froid.
Evolution de la collection
Nous continuons à enrichir la collection chaque année, en recherchant des variétés toujours plus originales, décoratives et spectaculaires, principalement grâce aux échanges avec Bernard Le Neindre du jardin Bambous en Provence et avec Stéphane Alzaix de la pépinière spécialisée Newfibamboo.
Vous pourrez ainsi admirer lors de votre promenade des grands classiques comme les immenses Phyllostachys vivax et Phyllostachys edulis qui culminent à 20m de haut pour des diamètres de chaumes de 12-14cm ; les gracieux Fargesia et Yushania aux feuilles très fines qui pleurent comme une cascade, notamment avec les Fargesias nitida et le Yushania velutina ; découvrir des cannes aux formes surprenantes avec le fameux ‘Kikko’ ou bambou carapace de tortues mais aussi avec les étonnantes mutations des variétés de Phyllostachys aurea…
Le monde des bambous n’a pas fini de nous surprendre !
Si vous souhaitez en savoir plus sur les bambous, notamment sur les dernières variétés trouvées en Chine et importées en France, visitez le blog de Newfibamboo.
Si vous cherchez des informations pratiques et des conseils techniques, ainsi que des conseils de culture, visitez notre page Bambous Conseil.
LES GRAMINÉES
Les bambous et autres graminées représentent l’immense famille botanique des Poacées (appelées « Graminées » jusqu’à une date récente). Cette famille peuple la quasi totalité de la terre, de l’Equateur aux abords des pôles. Elle regroupe la plupart des plantes qui nourrissent les hommes : le blé, le riz, le maïs…et les bambous.
Ce sont des plantes écologiques et d’avenir : peu de maladies et de parasites, excellente résistance à la sécheresse, peu d’entretien. Les graminées sont des végétaux modernes apparus récemment dans l’histoire de l’évolution : elles ont par exemple développé un système de pollinisation par le vent qui assurent leur survie sur de grands territoires. Elles sont d’une résistance à toute épreuve.
Les graminées ornementales
Beaucoup de graminées, gracieuses ou majestueuses, ont un intérêt décoratif majeur, que l’on n’a découvert en France que récemment. Les Miscanthus de Chine (hauteur de 1,5 à 4m), les Panicum d’Amérique (0,50 à 2m), les Pennisetum d’Eurasie (0,50 à 1,50m), les Fétuques (Festuca) d’Europe (0,25 à 0,60m) pour ne citer que ces genres regroupant chacune des dizaines d’espèces, sont devenus irremplaçables dans nos jardin : légèreté, couleurs, floraisons (épis ou panicules), leur grâce durable pendant l’hiver complète admirablement les paysages d’arbres, d’arbustes et plantes à fleurs.
Par ailleurs, leur pousse rapide, leur rusticité affirmée et leur peu d’exigence ne peuvent que susciter l’intérêt des jardiniers.
Le seul entretien consistera à les raser en fin d’hiver pour assurer un bon démarrage des jeunes pousses au printemps.
La paille, c’est à dire le feuillage sec ainsi obtenu, une fois broyée, sert idéalement de paillage pour d’autres plantes plus sensibles au froid ou à la sécheresse.
Le Jardin de Planbuisson compte environ une centaine de graminées ; voici les principaux genre que vous pourrez rencontrer lors de votre visite : -Miscanthus – Panicum – Pennisetum – Carex – Molinia – Festuca – Arundo – Cortaderia – Stipa – Calamagrostis – Achnaterum – Hakonechloa…
LES ARBUSTES
Avant de se passionner pour les bambous, Michel Bonfils, féru de botanique, avait commencé la plantation de diverses collections d’arbustes rares. Le jardin compte ainsi des collections de Viburnum (Viornes), Cornus (Cornouiller), Aucuba, Buxus (Buis), Euonymus (Fusain), Osmanthus…
Bien que le jardin soit un conservatoire botanique de bambous, nous enrichissons chaque année également les collections d’arbustes afin de poursuivre son oeuvre et d’offrir aux visiteurs un maximum de diversité de formes, de couleurs, de senteurs…
Nous avons ainsi récemment enrichi les collections d’Hibiscus (Althéas), de Nandina, d’Hydrangea (Hortensias), de Spiraea (Spirées) etc. et introduit des genres incontournables qui faisaient défaut tels que Lagestroemia (Lila des Indes), Deutzia, Acer palmatum (Erable japonais), Azalea…
LES ARBRES
Bien que les arbres du jardin aient été plantés relativement récemment, puisque les plus anciens ont 30 ans, leur taille est déjà spectaculaire en raison d’un sol particulièrement riche et profond (plaine alluviale de la rivière Dordogne).
Le parc en compte une cinquantaine, des classiques essences majestueuses telles qu’un Chêne pyramidale, Ginko biloba ou Arbre aux 40 écus, Populus alba (Peuplier blanc), Sophora japonica, Cedrus atlantica(Cèdre de l’Atlas) etc. et bien sûr les noyers du Périgord (Juglans regia) ; et des essences beaucoup plus rares telles que Quercus libani (Chêne du Liban), Cyclobalanopsis myrsinaefolia, Fraxinus excelsior ‘Crispa’ (Frêne à feuilles crispées), Alnus glutinosa ‘Imperialis’ (Aulne à feuilles laciniées) et beaucoup d’autres…
LES MASSIFS FLEURIS
Au fil des années, nous avons enrichi ce qui constituait les collections de graminées du jardin avec des vivaces et de petits arbustes. Vous pourrez admirer durant la promenade 4 massifs fleuris principaux, et une succession de petits paysages.
Les graminées, absentes pour la plupart durant les mois de mars et avril (après avoir été rasées pour renouveler le feuillage sec), recommencent à prendre du volume à partir du mois de mai. Elles sont au plus beau lorsque leurs panicules floraux s’élèvent dans les airs à partir du mois de juillet et août.
Les vivaces permettent ainsi d’offrir de belles compositions aux visiteurs en début de printemps, période d’absence des graminées. Elles sont donc incontournables en association avec ces dernières.
Les graminées apportent beaucoup de légèreté, de souplesse et de grâce aux massifs.
Les vivaces et les arbustes de petits développement apportent de la couleur et des contrastes très intéressants de feuillages.
Nous avons choisi des formes souvent arrondies qui mettent bien en valeur le port élancé ou érigé qu’ont souvent les graminées, ainsi que des vivaces colorées par leurs fleurs ou leurs feuillages qui soulignent le feuillage le plus souvent vert des graminées.
LES PALMIERS
Les palmiers, plantes éminemment exotiques, se marient parfaitement aux bambous et ajoutent encore au dépaysement.
En raison d’un climat peu clément (température régulièrement en dessous de -10°C) et d’un sol lourd d’où l’humidité s’évacue difficilement, seules les variétés les plus rustiques ont trouvé leur place dans le jardin.
Vous pourrez observer les fines silhouettes de : Trachycarpus fortunei / Trachycarpus fortunei ‘Wisan’ / Sabal minor / Washingtonia robusta
LES ENSEMBLES PAYSAGERS
Lorsque l’on plante un jardin à partir d’un espace “nu” (prairie, clairière etc.) la tendance est très souvent de planter très serré, impatient de combler le vide par un maximum de plantes et de voir rapidement naître un jardin luxuriant.
En grandissant, les plantes se concurrencent pour la nourriture, l’eau et la lumière et il faut alors faire des choix pour décider comment les réharmoniser.
Voilà comment sont nés les ensembles paysagers du jardin, dans un souci permanent de garder un maximum de diversité tout en faisant en sorte que chaque plante ait l’espace de se développer et de s’épanouir.
Le jardin présente ainsi une série de paysages composés d’une succession de plants, avec, bien souvent bien sûr, les bambous en toile de fond.
LES TOPIAIRES
Au début, les plantes du jardin étaient laissées libres, aucune taille n’était pratiquée car nous trouvions la nature assez harmonieuse sans qu’il y ait à intervenir. L’idée de tailler certains arbustes est née un peu par hasard. Au coeur du jardin, étaient plantés trois arbustes ; un Juniperus pfitzeriana et deux Buxus rotundifolia. Leur fort développement et leur feuillage très sombre ont donc fini par former un masse peu esthétique occultant complètement la vue. Le choix s’est donc présenté de les couper complètement, mais étant plantés depuis plus de 10 ans, ils faisaient déjà parti du jardin et nous souhaitions respecter leur présence. Nous avons donc décidé de tenter d’alléger le Juniperus en dégageant le feuillage au centre pour pouvoir apercevoir l’arrière plan, composé d’un bambou très rare et très lumineux que nous souhaitions absolument mettre en valeur : Phyllostachys edulis ‘Bicolor’. D’autant que le port naturellement horizontal de ce Juniperus était très esthétique. Peu à peu, c’est donc une taille “en nuages” qui est finalement apparue.
En constatant le résultat très harmonieux de ce type de taille qui se marie très bien avec la verticalité des cannes de bambous, nous avons décidé de poursuivre et de tailler les deux Buxus de la même manière.
Nous nous sommes alors aperçu que les tailles de certains arbustes, loin de paraître incongrues dans un jardin très naturel de graminées, mettaient en relief ces dernières. Nous avons alors taillé d’autres arbustes, le plus souvent en boules, pour souligner le feuillage érigé et fin des graminées du jardin.
LE JARDIN SEC
Michel Bonfils était très intéressé par la philosophie bouddhiste, notamment dans son aspect contemplatif, qui fait écho à ce que l’on peut ressentir lors de la visite d’un jardin. L’intégration d’un “jardin sec”, nu et épuré, dans son propre jardin, véritable jungle luxuriante, découle ainsi d’un ressenti personnel qu’il a souhaité partager avec les visiteurs.
Cet espace s’intègre parfaitement au jardin en créant d’étonnants contrastes : tout d’abord un espace “vide” dans un jardin extrêmement “plein” avec toutes ces variétés de bambous ; ensuite l’aspect “minéral” avec le “végétal” ; enfin l’horizontalité de cette “mer de gravier” avec l’absolue verticalité des cannes de bambous en arrière plan.
Voici un extrait du texte qu’il a rédigé, à découvrir dans le jardin sec :
“Le jardin sec de tradition zen du Japon (…) est un espace de contemplation solitaire et silencieuse sur l’univers (le cosmos), la nature (…). Cet espace évoque (…) le vide de pensées parasites et notamment de désirs, qui est un fondement de la pensée bouddhiste…”